2,01 milliards de tonnes. L’équivalent de 800 000 piscines olympiques. Voici, selon la Banque mondiale, la quantité de déchets générée à l’échelle mondiale en 2016[1]. Et il n’est question que de la production de déchets municipaux solides… La tendance en la matière s’oriente vers une production de 3,40 milliards de tonnes en 2050. Mazette ! Un monde de déchets, en somme.
Alors qu’il est aujourd’hui beaucoup question de circularité, nous nous penchons ici sur des perspectives plus enthousiasmantes.
Des promesses
La directive 2008/98/CE institue un cadre légal pour le traitement des déchets de l’Union européenne (UE). Pour atténuer les pressions sur les ressources et améliorer leur utilisation, elle souligne notamment l’importance d’une gestion des déchets appropriée, ainsi que des techniques de valorisation et de recyclage.
Tel est le contexte dans lequel émergent deux notions cousines : la sortie du statut de déchet (art. 6) et les sous-produits (art. 5). Toutes deux ouvrent des perspectives aux matières secondaires: accès au marché facilité, sécurité juridique et simplification administrative. Elles soulèvent par ailleurs de nouvelles questions: respect des normes de produits, de REACH, etc.
Par ici la sortie !
On parle de sortie du statut de déchet (SSD) ou d’End of waste (EoW) lorsque, sous certaines conditions, les déchets qui ont subi une opération de recyclage ou une autre opération de valorisation sont considérés comme ayant cessé d’être des déchets.
Cette nouvelle vie suppose :
- Une utilisation à des fins spécifiques ;
- L’existence d’un marché ou d’une demande ;
- La satisfaction à des exigences techniques ;
- L’absence d’effets globaux nocifs.
Dans le respect de ces conditions fondamentales, des critères plus précis peuvent être développés pour des flux de déchets particuliers au niveau de l’UE ou à l’échelle nationale (régionale en Belgique). Sont actuellement visés par des critères européens de fin de vie des déchets : la ferraille, le cuivre et le verre, ainsi que les déchets biodégradables.
Dans la droite ligne du Plan d’action pour l’économie circulaire très récemment adopté, la Commission européenne prévoit d’évaluer, en 2021, le développement de nouveaux critères de fin de statut de déchets. Les flux complémentaires seront déterminés compte tenu des enjeux de circularité, des transferts intracommunautaires et des taux de valorisation actuels.
Des élus au pays des résidus
En douze mots, un sous-produit est un résidu de production qui ne doit pas être considéré comme un déchet. Plus précisément, une substance ou un objet issu d’un processus de production dont le but premier n’est pas la production dudit bien peut être considéré comme un sous-produit (et non comme un déchet) aux conditions suivantes :
- L’utilisation ultérieure de la substance ou de l’objet est certaine ;
- Cette utilisation peut être directe, sans traitement supplémentaire autre que les pratiques industrielles courantes ;
- La substance ou l’objet est produit en faisant partie intégrante d’un processus de production ;
- L’utilisation ultérieure est légale, c’est-à-dire que la substance ou l’objet répond à toutes les prescriptions pertinentes relatives au produit, à l’environnement et à la protection de la santé prévues pour l’utilisation spécifique, et n’aura pas d’incidences globales nocives pour l’environnement ou la santé humaine.
Une Communication interprétative de la Commission avait d’ailleurs déjà été publiée sur le sujet en février 2007. Bien que relativement ancienne, elle donne encore un éclairage utile sur les notions et critères considérés en 2020.
À titre d’exemple, la sciure, les copeaux et les chutes de bois non traité issus de scieries ou de la fabrication de meubles constituent des sous-produits. Ces derniers sont notamment utilisés comme matières premières dans la production de panneaux de bois.
En Belgique, la gestion des déchets est de compétence régionale. Trois trajectoires à suivre, donc.
Chez Piet le Flamand
Pionniers en 2011 et 2012, le Materialendecreet et le VLAREMA prévoient que certains déchets spécifiques ne sont plus des déchets s’ils ont fait l’objet d’un traitement de valorisation. La grondstofverklaring est une des clés essentielles du système. Cette décision motivée de l’OVAM (Openbare Vlaamse Afvalstoffenmaatschappij) précise qu’une matière spécifique produite par un producteur déterminé pour telle application particulière, perd son statut de déchet. Elle devient alors une matière première.
Chez Jef le Bruxellois
Aujourd’hui, l’arrêté relatif à la gestion des déchets, le Brudalex, assortit l’obtention d’une fin de statut de déchet à deux conditions :
- L’exploitant d’une installation de valorisation de déchets doit demander un permis d’environnement ou introduire une déclaration préalable ;
- Il doit y démontrer le respect des exigences du Système de Gestion de la Qualité.
A titre spécifique, la réutilisation des terres de déblai ou des granulats dans ou sur le sol implique le respect des conditions d’un code de bonne pratique.
Si l’optique est d’utiliser une matière secondaire ayant obtenu le statut de fin de déchet dans une autre Région, une demande de permis d’environnement est également nécessaire. En effet, l’utilisation des matériaux valorisables est une activité visée par la rubrique 178 de la liste des installations classées.
Bon à savoir : Bruxelles Environnement s’attelle à la rédaction d’une série d’arrêtés qui devraient préciser les conditions auxquelles devront répondre certains flux pour sortir du statut de déchet. Pour ce qui concerne les sous-produits, le permis d’environnement peut préciser les conditions dans lesquelles, au sein d’une installation classée, une substance ou un objet est reconnu comme un sous-produit. L’article 8 de l’Ordonnance relative aux déchets s’applique de plein droit sans nécessiter une procédure particulière de reconnaissance.
Chez Marie la Wallonne
La Wallonie a d’abord intégré les concepts aux articles 4bis et 4ter de son décret cadre relatif aux déchets. Elle a ensuite adopté les arrêtés sortie du statut de déchet et sous-produits en février 2019.
Les procédures établies par les deux arrêtés sont relativement semblables. Les textes considèrent trois possibilités :
- La reconnaissance de sortie du statut de déchet ou de sous-produit, dont nous brossons le portrait ci-après ;
- Un enregistrement dans le cas où des déchets ont déjà obtenu cette reconnaissance ;
- La reconnaissance d’une décision prise dans d’autres Etats ou Régions.
Sortie du statut de déchet
Le premier arrêté détermine la procédure de sortie du statut de déchet pour les déchets ayant été valorisés ou recyclés. La demande peut émaner d’un ou plusieurs exploitants, d’un groupement ou d’une fédération d’entreprises.
Elle contient notamment les éléments suivants :
- L’identification du déchet ;
- La description de l’opération de recyclage ou de valorisation du déchet, les flux d’entrée utilisés et les étapes qui aboutissent à la substance ou à l’objet ;
- La description de l’application visée spécifiquement ou de l’utilisation de la substance ou de l’objet pour lequel la reconnaissance de sortie du statut de déchet est sollicitée et sa justification ;
- La description du système de gestion de la qualité.
A noter que les annexes de l’arrêté prévoient d’ores et déjà les critères déterminant à quel moment un papier ayant subi une opération de valorisation et devant être utilisé comme fibre de papier pour la fabrication du papier cesse d’être un déchet. Il en va de même des granulats recyclés élaborés à partir de déchets inertes.
Reconnaissance comme sous-produits
Le second arrêté fixe les modalités procédurales de la reconnaissance d’une substance ou d’un objet comme sous-produit à la demande d’un exploitant.
La demande de reconnaissance doit notamment comporter une note établissant que la substance ou l’objet satisfait à l’ensemble des conditions de base. elle doit aussi fournir un aperçu du procédé de production avec description des flux d’entrée utilisés et des étapes qui aboutissent au sous-produit.
L’annexe de l’arrêté liste les catégories de substances ou d’objets d’ores et déjà reconnus comme sous-produits, en y associant les processus de production et modes d’utilisation concernés. On peut notamment citer :
- Les flux connexes de l’industrie agroalimentaire ;
- Les résidus et rémanents de bois ;
- Les résidus d’écorce et de liège ;
- Les sciures de bois et les copeaux ;
- Les panneaux non conformes ;
- Les chutes de coupe et produits hors spécifications.
Qu’il s’agisse de sortie de statut de déchet ou de la reconnaissance du statut de sous-produit, l’administration statue dans un délai de 75 à 110 jours à dater du jour de l’envoi de sa décision attestant du caractère complet de la demande. Les frais d’instruction de dossier s’élèvent à 500 €.
Les formulaires de demande et des canevas de dossier technique à compléter pour les demandes de sorties de statut de déchets et de reconnaissances de sous-produits sont disponibles en ligne.
Suivez le guide…
Nous avons rapidement présenté le contexte européen et développé en quelques mots les récentes évolutions régionales en matière de fin de statut de déchets et de sous-produits. Il y a bien entendu davantage à en dire, notamment en ce qui concerne les différentes opportunités et options qui s’offrent aux exploitants.
ADVISTA reste donc à votre disposition pour des visites guidées plus complètes.
[1] S. Kaza, L. Yao, P. Bhada-Tata and F. Vaan Woerden, What a waste 2.0 – A Global Snapshot of Solid Waste Management to 2050, Word Bank Group, 2018 – Téléchargeable sur https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/30317